Qu'est-ce qu'une pandémie/panzootie:
A l'inverse d'une épidémie qui reste très localisée, une pandémie s'étend à plusieurs territoires, à plusieurs pays, voire un continent, un hémisphère ou même au monde. Elle est l'expression de
l'évolution d'une maladie humaine d'apparition nouvelle et assez rapide.
Quand une pandémie affecte les animaux, il s'agit d'une panzootie. (Prononcez panzoocie).
La grippe aviaire affectant pour l'instant préférentiellement les oiseaux, comme son nom l'indique et s'étendant dans de nombreux pays (asiatiques, africains et européens), elle est devenue une
panzootie.
La transmission de la maladie ne se fait qu'entre oiseaux à de très rares exceptions près.
Pour l'instant aucun cas de transmission du virus d'un humain à un autre humain n'a été prouvé.
Le risque en France:
Cette fois, impossible de le nier, le virus de la grippe aviaire a bien atteint l'Europe et la France ; il ne s'agit plus d'une maladie "exotique" !
Ce risque atteindra, semble-t-il, son maximum au retour des oiseaux migrateurs dans nos régions ou avec ceux qui feront des haltes sur nos points d'eaux.
Nos réseaux de surveillance et de contrôle des épidémies et des épizooties plus fonctionnels que ceux des pays en voie de développement laissent espérer l'apparition d'un nombre limité de foyers
infectieux dans notre pays. Malheureusement la limitation du nombre des foyers passe par des mesures de protection et d'abattage dans certains cas. Ces mesures, souvent mal perçues par la
population, sont indispensables pour limiter l'évolution des épizooties. Et elles le sont d'autant plus quand le réservoir sauvage et migrant ne peut être contrôlé.
Le virus est malheureusement peu sensible dans le milieu extérieur et peut être disséminé par d'autres espèces animales moins sensibles ou des supports inertes (roues de véhicules, semelles de
chaussures...).
Tous les citoyens sont des acteurs potentiels : les professionnels bien sûr, les chasseurs, les promeneurs qui découvrent un oiseau mort... les possesseurs d'animaux domestiques pouvant errer
(chats et chiens) et même les journalistes qui pourraient être responsables d'une dissémination passive du virus depuis le premier foyer de Versailleux dans l'Ain.
Tomber dans une psychose serait disproportionné mais il est nécessaire de se comporter de façon responsable et d'augmenter les règles d'hygiène et de désinfection.
Le virus H5N1:
Les virus de la grippe (humaine, équine, porcine et aviaire) forment une famille. Ils se caractérisent et se différencient par leurs protéines de surface, entre autres l'hémagglutinine (H) et la
neuramidase (N).
Chaque sous-type d'agent pathogène possède donc une hémagglutinine, différente et numérotée de 1 à 15, et une neuramidase, différente et numérotée de 1 à 9.
Pour le virus actuellement responsable de la grippe aviaire on parle de sous-type H5N1. Pour les virus grippaux contagieux de l'homme on trouve les sous-types H1N1 et H3N2.
Le virus H5N1 est très faiblement contagieux pour l'homme et d'autre part il n'est pas assez spécifique de l'espèce humaine pour permettre une transmission d'homme à homme. Cependant l'autre
particularité de ces virus est leur instabilité ce qui permet des mutations ou des fusions de matériel génétique, en quelque sorte des associations de malfaiteurs. Ainsi un virus H5N1, faiblement
contagieux pour l'homme mais hautement pathogène, pourrait fusionner avec un virus banal de type H3N2, peu pathogène mais hautement contagieux. Ainsi un nouveau virus apparaitrait, hautement
contagieux et hautement pathogène pour l'homme. C'est ce type de scénario hypothétique que tout le monde redoute qui a provoqué l'épidémie de grippe espagnole de 1918.
En réalité les cas de contamination humaine actuellement recensés sont encore heureusement peu nombreux. Ils touchent une population fragile : enfants ou personnes âgées, fragilisés par des
maladies intercurrentes ou des immunodépressions, et surtout, ayant été en contact étroit et prolongé avec des volailles infectées.
La maladie:
Les symptômes sont frustres. Ils varient en fonction de l'espèce touchée. Une mortalité brutale et d'importance croissante, avec prédominance de signes nerveux et respiratoires confirme la
suspicion conjoncturelle; mais seul le diagnostic du laboratoire avec la détermination du sous-type permettra de conclure.
Les mesures à prendre:
Les mesures prises (qui peuvent changer d'un jour à l'autre en fonction du contexte) visent à limiter le nombre d'oiseaux contaminés et par la même, le risque encore très faible de contamination
humaine.
Le but final étant de limiter le virus à son réservoir sauvage sous une forme peu pathogène. Dans le scénario actuel, il y a une amplification du pouvoir pathogène du virus sauvage au sein de
plusieurs espèces mélangées comme dans nos basse-cours. Lors de ce passage, le virus sauvage devient hautement pathogène et émerge au niveau de populations industrielles.
En pratique, la première étape consisteà interdire tous les rassemblements d'oiseaux (marchés, expositions, concours...), la seconde dans le confinement des
oiseaux, quand cela est réalisable, avec :
- un isolement des bâtiments (entrées d'air grillagées ...) ;
- la suppression des mangeoires et des abreuvoirs pour les parcours des élevages en plein air la suppression si possible de l'alimentation au sol ;
- la mise en place de clôtures et de filets d'isolement dans les élevages en plein air.
Ces mesures sont renforcées par une claustration totale dans les zones humides à risque et dans les départements à haute densité d'élevage (40,44 et 85)
Une vaccination est prévue pour les espèces qui ne pourraient être mise en claustration, vivant dans les zones humides à risque de ces départements.
Ces mesures sont aussi applicables pour les élevages en basse-cour après un recensement en mairie (obligatoire à compter du 6 mars 2006).
D'autres mesures sanitaires ont été et seront appliquées autour des foyers de cas avérés :
- zone de protection d'un rayon de 3 km autour du foyer ;
- complétée par une zone de surveillance de 10 km ;
- associée à une zone de vaccination en anneau pour stopper la progression du virus.
Rappelons que ces mesures doivent rester en place au moins jusqu'au retour des oiseaux migrateurs en provenance d'Afrique et du Moyen Orient au printemps 2006.
Et pour les perroquets ?
Nos perroquets, même s'ils sont sensibles et peuvent être infectés par le virus, offrent un risque de contamination très faible.
Ils doivent pour l'instant rester à l'intérieur. Si cela n'est pas réalisable, les volières doivent être protégées des déjections des migrateurs (simples tôles en guise de toitures) ; les
abreuvoirs et les mangeoires ne doivent pas être en contact avec le sol.
Il est impératif de désinfecter les volières extérieures avec l'eau du réseau urbain; l'utilisation dans ce but de l'eau d'une retenue naturelle ou artificielle est interdite.
Autour d'un foyer déclaré, l'accès aux pièces abritant les oiseaux devra être règlementé et limité aux seules personnes indispensables à la réalisation des soins journaliers.
Dans une telle situation, l'emploi d'un pédiluve pour les chaussures portées à l'extérieur ou de sur-chaussures sera fortement conseillé.
Lorsqu'un nombre important d'oiseaux, et surtout d'espèces rares, est présent (refuge, parc, zoo...) la vaccination préventive est conseillée et réalisable après demande auprès des Directions des
Services Vétérinaires du département. Les modalités de cette vaccination restent encore à définir et imposent l'interdiction des contacts avec des volailles domestiques ou des oiseaux
sauvages.
Article écrit par le Docteur Vétérinaire Pascal Perronin.