Le Picage chez les Psittacidés

Auteur : Dr vétérinaire Comportementaliste Muriel ALNOT-PERRONIN, 

 

 Le picage désigne l’action d’arracher des plumes que le perroquet s’inflige ou inflige à un congénère. C’est un trouble observé uniquement en captivité. Cependant, le diagnostic étiologique (recherche de la cause) s’apparente souvent à une véritable enquête et demande de procéder par élimination. Les causes peuvent être aussi bien comportementales, que ce soit un manque d’activité appropriées ou un défaut d’apprentissage concernant les soins du plumage…que médicales et dans ce domaine, extrêmement variées ! Préalablement à la consultation vétérinaire indispensable donc et aux éventuels examens complémentaires nécessaires, il est utile de recueillir les données suivantes : 

 

Les circonstances d’apparition :

  • la date approximative du début des pertes de plumes ou de l’arrachage de celles-ci,: un trouble ancien annonce souvent un pronostic plus sombre.
  • la vitesse d’évolution, qui permet de distinguer les troubles aigus des troubles  chroniques
  • la présence d’autres oiseaux dans la cage. Lorsque l’oiseau n’est pas seul, il est bon de le mettre à l’écart plusieurs semaines pour savoir si le picage n’est pas réalisé par le congénère. Si c’est le cas, la tête elle aussi peut être atteinte.

 

Les caractéristiques de l’environnement :

  •  la qualité de l’alimentation (à vérifier avec votre vétérinaire aviaire)
  •  les conditions de détention : la taille de la cage, le type de mangeoire, leur nombre, les matériaux et le diamètre des perchoirs, la présence d’un nichoir… etc
  •  le type et la durée d’éclairage sur 24 heures
  •  le taux d’humidité
  • les techniques de nettoyage et leur fréquence, le type de produits utilisés
  • la présence de changements dans l’environnement, antérieurs au picage, tels que des travaux de peinture ou tout simplement un changement de lampes…

A partir de ces premiers éléments, le vétérinaire va d’abord rechercher des causes médicales : Elles sont nombreuses et doivent systématiquement être envisagées. Parfois elles ne sont pas à elles seules les responsables du picage, mais la coexistence de plusieurs d’entre elles peut engendrer un stress biologique suffisant pour le déclencher : c’est le cas de parasitoses internes, de l’hypothyroïdie, des atteintes douloureuses, des troubles de la reproduction, des atteintes hépatiques,de l’hypocalcémie, des proventriculites... Certaines maladies sont directement responsables du picage: ce sont par exemple certaines atteintes dermatologiques bactériennes ou fongiques, certaines parasitoses externes, des défauts d’hygiène corporelle, des régimes alimentaires inadaptés ou encore certaines intoxications. La cause médicale la plus courante reste les carences alimentaires, provoquant un développement anormal des plumes puis un picage en conséquence.

Il existe des cas où une cause médicale est forcément présente (et éventuellement aggravée ou renforcée par un facteur comportemental), c’est le cas notamment lorsque :

  •  La tête de l’oiseau est  atteinte alors qu’il ne vit pas avec un congénère, car il est impossible pour lui de s’en arracher les plumes tout seul
  • Un prurit (démangeaison) est décelé, même si son existence est difficile à établir
  • Des dysmorphies (défauts dans la forme), des phénomènes nécrotiques (mort des cellules) ou inflammatoires importants sont visibles

Attention, le fait qu’un perroquet n’ait pas l’air malade ne veut pas dire qu’il soit en bonne santé.

 

Une origine comportementale est suspectée seulement lorsque les causes médicales ont été éliminées. Cependant, des causes comportementales sont toujours recherchées lorsqu’une maladie a été reconnue comme l’origine du picage.


Causes comportementales :

 

Ce sont en général les parties faciles à atteindre qui sont atteintes en premier : le pli du patagium (pli de peau correspondant sur l’aile au creux du coude), les membres postérieurs (à mi-cuisse), la région sternale ou la queue. Il est couramment considéré que si la tête est intacte, le picage est probablement d’origine comportementale, mais ce n’est pas si simple ! 

 

Certaines familles de perroquets semblent génétiquement plus prédisposées au picage que d’autres : ce sont les Cacatoès, les Gris du Gabon, les Amazones et les  Ara.  Néanmoins le genre Eclectus et les familles de Conures sont aussi très souvent touchés.  Quelques études avancent en outre une prédisposition génétique plus importante chez les femelles.

Parmi les causes les plus courantes, l’on peut citer :

  • Le manque d’activité ou de stimulations : pour les perroquets, le silence et la solitude sont fortement déconseillés, laisser des jouets à leur disposition dans la cage ne suffit pas
  • Les jouets non adaptés aux perroquets (dangereux, toxiques etc)
  •  la modification de l’emplacement dédié à l’oiseau : les positions devant les baies vitrées sont généralement peu appréciées les mettant en situation « non protégée »
  •  une trop grande de fréquentation de la pièce ou une surpopulation à l’intérieur même de la cage
  • la méconnaissance des interactions sociales et de la communication normale chez le perroquet : toucher certaines parties du corps déclenche fréquemment un stress (caresser le dos) et le manque de socialisation à l’être humain (perroquet d’importation, élevage par les parents exclusivement) renforce le stress car les contacts non désirés par l’oiseau deviennent traumatisants
  • un défaut d’apprentissage au toilettage (lors de troubles du développement)
  •  la présence ou l’arrivée d’autres animaux, notamment les chats pour les oiseaux de petite taille des bruits soudains et inattendus

 

Dr Muriel ALNOT-PERRONIN,  mars 2014.